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Tiphaine Samoyault
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Tiphaine Samoyault est née à Boulogne-Billancourt en juin 1968. Elle vit à Paris. Elle enseigne la littérature comparée à l'université Paris VIII. Elle est l'auteur de romans notamment La Cour des adieux, Maurice Nadeau, (1999) et Les Indulgences, « Fiction & Cie », Seuil, (2002) et d’essais, L’Intertextualité, mémoire de la littérature, Nathan, (2001), La Montre Cassée, Verdier, (2004). Elle a participé a deux ouvrages collectifs, Écrire, pourquoi ?, (2005) et Face[s], photographies d’Olivier Roller (2007) publiés par Argol.
© Photo : Olivier Roller
En revenant sur son enfance dans La Main négative, son dernier livre, Tiphaine Samoyault revient sur ses années « bordées de tapisseries ». Lenteur du métier à tisser, persistance du monde artisanal... il restait alors « des lieux où l'on continuait à faire toutes ces choses à la main ». La main de l'enfance passe dans le récit, ébouriffe la mémoire, glisse ses doigts dans les replis du temps. Images et souvenirs sont convoqués pour prendre la mesure du temps, de ces moments qui durent encore. Il ne s'agit pas de verser dans la nostalgie, mais de projeter le passé dans l'avenir. « J'écris comme on restaure une tapisserie », indique Tiphaine Samoyault, qui rappelle le souvenir de son grand-père, tendant triomphalement un brochet de six livres sur une carte postale, ou celui de sa grand-mère, couturière, raccommodant ses ours en peluche. On se souvient de Jules Vallès reprisé, retaillé dans les vêtements paternels, et reprenant pour écrire l'aiguille et les ciseaux. On se souvient de Céline regrettant la tradition de la dentelle où sa grand-mère excellait. Tiphaine Samoyault retient de ses parents, restaurateurs des tapisseries du Patrimoine national, l'art du nœud. C'est à travers le savoir acquis dans les manufactures de l'enfance, en distinguant embrasses et galons, en maîtrisant le nuancier des soieries, que l'écrivain accède à la connaissance du monde. C'est à travers l'art du nœud qu'elle va à la rencontre de l'artiste Louise Bourgeois. Ici, écrire, « une des rares choses que j'ai toujours faites seule avec mes mains»; là, sculpter étoffes et tapisseries. La Main négative compare les gestes, les techniques, les objets, les canevas, les tissus, et reconnaît partout le travail du point dans son entêtement façonnier. Portrait de l'artiste en petite main, qui restaure, raccommode, rapetasse et rend au monde nos visages et nos vies couturées. La femme artiste y travaille, poursuivant le geste archaïque des femmes qui, déjà, peignaient sur le mur des cavernes l'origine du monde. L'enfance textile de Tiphaine Samoyault vérifie le rapport du texte au tissage. Les nœuds peuvent se rompre, les choses continuent de tenir ensemble. La main coud et brode avec ses instruments modestes. L'œuvre est signée, à la manière dont signait l'artisan: Tiphaine Samoyault fecit, anno2008. Aliocha Waldlasowski, Le Magazine littéraire, juin 2008
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Au tout début de l'avant-dernier épisode d'Histoire(s) du cinéma, une voix déclare: « (Les uns pensent, dit-on / les autres agissent / mais la vraie condition de l'homme / c'est de penser avec ses mains ». Ou encore : « L'esprit n'est vrai / que lorsqu'il manifeste sa présence / et dans le mot manifester / il ya main. » Afin de ne pas se tromper sur le sens du très beau livre que signe aujourd'hui Tiphaine Samoyault, afin de ne pas le confondre avec l'essai sur l'artiste Louise Bourgeois qu'il n'est pas, sans doute faudrait-il le définir précisément comme un « manifeste » et le faire en se souvenant de l'étymologie - peut-être fausse - que Jean-Luc Godard donne de ce mot. Car c'est la main ici qui mène la pensée et l'oblige à une émouvante récapitulation de tout ce que fut une vie de manière à prendre le pari qu'un présent soit encore possible: la main qui tisse et celle qui écrit, la main qui caresse et celle qui crée, la main qui laisse une empreinte et celle qui fait un signe. Un « manifeste » consistait autrefois en la liste des marchandises qu'emportait un navire : et le livre de Tiphaine Samoyault contient une formidable cargaison de souvenirs et de sensations, de couleurs et de formes à partir desquels s'étend toute la longue tapisserie du temps. Le mot désigne aujourd'hui toute déclaration dont se déduit une certaine position éthique ou esthétique: et, bien qu'il se garde de toute théorie explicite, ce livre porte en lui la promesse accomplie d'une écriture de soi inventant un art juste de la méditation et de la variation poétiques. Je n'oublie pas que l'adjectif « manifeste » signifie égaIement « évidemment et indubitablement vrai ». Car chaque page du nouveau livre de Tiphaine Samoyault me le rappelle. Philippe Forest, Artpress, juin 2008 Dossier de présentation et lecture sur le site du cipM http://www.cipmarseille.com/pop_audio.php?id=687 |